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Sasha Lanièce, une navigatrice engagée pour la mixité professionnelle

Malouine d’adoption et scientifique, engagée et passionnée, Sasha Lanièce, 27 ans, nous présente son parcours et le défi qu’elle s’est fixée : participer à la Mini-Transat en solitaire en 2023.

1 – Sasha, Pouvez-vous nous décrire votre parcours professionnel ?

Issue d’une fratrie de quatre filles, j’ai grandi en ville, à Paris, loin de la mer. J’ai découvert la voile à l’âge de 14 ans, lors d’un stage d’été à l’école des Glénan. C’est le début de ma passion !

Ces dernières années, mes études d’ingénieur m’ont énormément occupée. Alors, une fois diplômée, en octobre 2018, j’ai ressenti le besoin de m’octroyer une année sabbatique pour revenir à la voile. Mon rêve était de rejoindre la Nouvelle-Zélande en bateau-stop. Ce périple n’a pu aboutir entièrement mais m’a permis de naviguer durant six mois sur près de 4000 milles. Après cela, je me suis installée sur la côte d’Emeraude avec l’objectif de passer le diplôme international de skipper, puis me lancer dans la course au large. J’aime le côté technique de la voile, trouver des solutions aux difficultés et optimiser. Au printemps 2019, je me suis intéressée à la Mini Transat, cette course en solitaire menée sur des bateaux de 6,50m. Et c’est le déclic ! Quelques mois plus tard, je décide de mettre ma carrière scientifique entre parenthèse pour me consacrer pleinement à la préparation de la prochaine course en 2023. Elle part des Sables-d’Olonne pour rejoindre la Guadeloupe via les Canaries sans aucun moyen de communication avec l’extérieur. Au même moment, je me suis inscrite à Femmes de Bretagne. J’y ai rencontré d’ailleurs Charlotte Méry, une ministe que j’admire, et qui a navigué aux couleurs de l’association lors de la Mini Transat en 2017.

2 – Vous souhaitez naviguer pour la mixité professionnelle, pourquoi cet engagement ?

Lors de mes études, nous étions seulement 5 filles pour 200 garçons ! En fait, j’ai constaté que plus on gravit les échelons, moins il y a de filles. C’est pourquoi j’ai décidé de m’investir dans l’association « Pour les Filles et la Science » de la Fondation l’Oréal. Je suis allée dans les lycées pour promouvoir les études scientifiques. Les filles ont une méconnaissance des métiers d’ingénieur. Elles ont en général peur de se lancer. Elles sont prudentes. Parler de mon parcours les aide à démythifier ce métier. Dans le domaine de la voile, nous sommes aussi très peu nombreuses. Depuis 1989, seulement six filles ont participé au Vendée Globe. Pourtant, sur notre bateau, en solitaire, on est sur le même pied d’égalité et nous avons nos atouts. Certes, notre force physique est en dessous de celles de nos partenaires masculins mais cela nous incite à anticiper davantage ; les filles ont souvent un coup d’avance sur la météo ! Elles sont aussi mieux organisées pour la préparation du bateau. Certaines navigatrices m’ont même dit que devenir mère et s’occuper d’un nourrisson la nuit leur a donné plus de capacités pour supporter les nuits fractionnées et mieux récupérer de la fatigue. Ce qui me porte, c’est le plaisir de naviguer et le challenge intellectuel et physique que cela représente. Mais, plus que tout, j’aime partager mon aventure, montrer aux jeunes filles qu’elles peuvent réussir si elles sont motivées, leur donner le courage de se lancer, les convaincre que rien n’est insurmontable.

3 – Quel regard portez-vous aujourd’hui sur les femmes qui entreprennent ?

J’ai plaisir à les côtoyer. Elles me procurent de l’énergie pour avancer. Quand je me suis lancée, je savais gérer un projet mais je ne connaissais que peu de choses du fonctionnement d’une entreprise. Cela nécessite tellement de polyvalence, entre la communication et la gestion d’un budget. J’ai participé à des ateliers du réseau pour apprendre et partager. C’est grâce à des entrepreneuses que je me suis constituée un réseau. Il y a de l’écoute, une bienveillance et de l’entraide m’inspirant beaucoup. Les trois années qui m’attendent vont me permettre de me préparer techniquement à la Mini-Transat mais aussi de partager mon expérience. Je me lance dans une course en solitaire et un engagement solidaire. Je vais aller à rencontre des écoles ou des entreprises qui ont du mal à recruter des femmes. Je compte embarquer des jeunes filles issues des quartiers défavorisés pour leur faire découvrir la voile. Et puis, j’espère un jour monter ma propre écurie féminine en Bretagne. La Mini-Transat en 2023 est un début. Un jour, je m’imagine passer le Cap Fréhel avec mon class 40 pour la Route du Rhum. Un nouveau challenge en perspective qui me fait déjà rêver.